INTERVIEW
► Martin Edenik: Bonjour, Ka Ti! Vous éprouvez pour l’artiste Frida Kahlo une admiration particulière.
► Ka Ti: Je connais Frida Kahlo seulement depuis la sortie du film ‘‘Frida’’, en 2002, et de la lecture de Hayden Herrera, dont le film est inspiré, ainsi que du livre ‘‘Diégo et Frida’’ (Le Clézio). Il faut reconnaître que c’est une femme admirable, sa vie, ses amours, ses souffrances. Je ne sais pas... J’ai dû être impressionnée par une telle femme. Elle a dit quelque chose qui m’a marquée : «On me prenait pour une surréaliste. Ce n’est pas juste. Je n’ai jamais peint de rêves. Ce que j’ai représenté était ma réalité».
► Martin Edenik: Vous vouez à la ville de Paris une véritable reconnaissance. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi?
► Ka Ti: Je suis arrivée à Paris, toute petite. Je ne connaissais pas grand-chose… Je venais d’une famille qui s’intéressait peu à la culture. J’ai arpenté la ville dans tous les sens, elle m’a tout offert, musiques, musées, galeries, livres... Tout y est: les sons, les images, les ambiances, la vie.
Elle m’a fait faire le tour du monde en son seul centre.
► Martin Edenik: Quand on vous interroge sur votre processus de création, vous vous démarquez du «lâcher-prise» qu’invoquent souvent les artistes qui laissent s’exprimer dans leur œuvre leur imaginaire. Est-ce le côté «art-thérapie» qui vous gêne?
► Ka Ti: Difficile d’expliquer! Dans l’acte créatif, chacun de nous exprime ce qu’il y a au plus fort de nous-même, sans conscience réelle. Dans cet exercice que je pratique, il s’agit d’une ouverture en soi. Je ne lâche rien, j’essaie juste d’atteindre quelque chose. C’est peut-être jouer sur les mots... Lorsque je dessine, je ne cherche pas une interprétation, j’y ai mis ce que j’avais dans les tripes: quoi? Je ne sais pas... Après, cette histoire ne m’appartient plus. A quelqu’un d’autre d’y mettre ses propres mots, ses concepts, sa vision. D’ailleurs, je pense que j’écris une histoire, davantage que mon histoire.
► Martin Edenik: Vous participez régulièrement à des Festivals d’Art Singulier. Vous sentez-vous singulière?
► Ka Ti: Je ne sais pas si je suis singulière. Disons que ce mouvement me correspond. Avec les artistes, nous avons les mêmes discours sur le travail effectué, la même démarche. C’est un art pour tous, un art populaire, c’est en cela que je me sens singulière. Après dans ce mouvement, il y a tellement de styles différents... D’ailleurs, il y a les singuliers, les insolites, les hors-les-normes, les
outsiders, les marginaux, l’expression libre, l’art cru et ainsi de suite. On a du mal à trouver les termes exacts; disons que chez les Singuliers, il y a plus de
liberté picturale, mais bon, ça reste un «tiroir»! J’apprécie d’ailleurs les expos collectives quel que soit le style, j’ai déjà exposé avec des Plasticiens dits Abstraits. La rencontre, au début, a été timide. Après, tout est rentré dans l’ordre et personne, ni les artistes, ni les visiteurs, n’a été choqué du mélange, au contraire. Je trouve que c’est enrichissant, du moins pour moi…
► Martin Edenik: Cet «état de rêve» dans lequel vous travaillez, exige-t-il une sorte de rituel préparatoire?
► Ka Ti: Je n’ai pas de rituel ni de moment particulier… Il s’agit seulement de me sentir en connexion avec moi-même. Ça peut être dans le bruit ou le silence (bien que la musique soit essentielle ), seule
ou avec d’autres. C’est très aléatoire, la connexion n’est jamais la même. Mais une chose est sûre, je suis une couche-tard, mais la nuit, je dors.
► Martin Edenik: Combien de temps consacrez-vous, chaque jour, à la création? Et comment gérez-vous cette passion au quotidien?
► Ka Ti: Je dessine depuis que j’ai l’âge de tenir un crayon. J’ai décidé de quitter mon travail pour m’en offrir un plus près de moi. Depuis sept ans, je suis inscrite comme professionnelle. Je dirai que je vis
dedans, que je vibre avec… Une vraie richesse! J’y passe le plus de temps possible, mais ce temps n’est pas défini, Je n’en sors jamais vraiment.
► Martin Edenik: Quels artistes admirez-vous? Y en a-t-il, parmi eux, qui ont contribué à faire de vous l’artiste que vous êtes?
► Ka Ti: Des tas ! Le premier, Salvatore Dali. je suis allée à Figueras plusieurs fois. Puis Miró, Chagall, F. Kalho, R. Lindner, Gaudi, Verlinde, Hundertwasser, J. Hélion, G. Klimt... Je continue? La liste est longue! A chaque fois, que je vois une exposition, je suis transportée. J’aime les surréalistes, les Dada, l’Art Brut, les Arts Premiers, les lieux insolites (le Palais Idéal du Facteur Cheval, le Musée Robert-Tatin, La Halle Saint-Pierre). Je ne sais pas s’ils m’ont inspirée directement, mais quand je les vois, je reviens remplie d’images, de couleurs et de force… Quels qu’ils soient!
► Martin Edenik: Avez-vous, pour 2013, des projets d’expositions? Vous verra-t-on à Paris?
► Ka Ti: Pour l’instant, pas encore beaucoup de projets. Je fais, en juin 2013, le Festival
ArtenSeine, à Saint-Aubin-les-Elbeufs et, en février, en région parisienne, à Viry-Chatillon, dans un lieu qu’on appelle La Ferme, le week-end du 22/23 février, en compagnie de quatre autres artistes, pas forcément singuliers.
► Martin Edenik: Trois choses que vous adorez? Et leurs contraires?
► Ka Ti: J’aime les Calissons!!! D’un point de vue humain, le contact, l’échange et la nouveauté. Je déteste, non pas d’être seule, mais la solitude. Celle qui nous fait douter.
► Martin Edenik: Y a-t-il une question à laquelle vous auriez aimé répondre? Un sujet, une cause qui vous tienne à cœur... Et quelle est sa réponse?
► Ka Ti: Je me pose tellement de questions, pour une fois, je vais éviter de m’en poser… Paraît que ça permet de vivre plus intensément.
► Martin Edenik: Quel sera votre mot de la fin?
► Ka Ti: Merci Martin, et très belle journée!
– The End –